Enfants de la Vienne, jeunes Ponticauds, Nous sommes les fils de cette race fière, campés sur les bords de la belle rivière .
A la fin des années 1920, la construction de la nouvelle gare est lançée, celle des Coutures également. Photothèque Paul Colmar, Article du Populaire du Centre sur les quartiers de Limoges.
Début des années1930, les premiers bâtiments de la cité des Coutures voient le jour, ainsi que la rampe Locarno. Photothèque Paul Colmar, Article du Populaire du Centre sur les quartiers de Limoges.
Début des années 1940, avec les Coutures, l'avenue Locarno se développe. Photothèque Paul COLMAR, Article du Populaire du Centre sur les quartiers de Limoges.
Une vue des "COUTURES" prise depuis la gare. Archives municipales 6Fi1446.
►L’Office Public d’Habitation de la ville de Paris, créé en 1914, sert de modèle à la constitution de nombreux offices municipaux ou départementaux qui se généralisent au lendemain de la Première Guerre mondiale.
A Limoges, l’Office Public des Habitations à Bon Marché (OPHBM) naît en 1919. Il doit remédier à l’état déplorable du logement des catégories populaires en cette période d’entre deux- guerres. La municipalité socialiste engage un important programme de construction, à l’instar de nombreuses communes de gauche en France. De 1924 à 1956, l’O.P.H.B.M. livre 1 800 logements, sur huit sites différents. La cité-jardin de Beaublanc, construite par Roger Gonthier, en est le premier exemple.
La cité des Coutures est réalisée entre 1925 et 1932 (540 logements) en deux tranches successives auxquelles s’ajoute ensuite une dernière tranche en 1955 (75 logements supplémentaires), ce qui porte le total des logements à 615.
On compte alors 28 immeubles de quatre étages comprenant chacun 6 ou 8 logements.
Les premiers locataires prennent possession des lieux le 29 juin 1929. La cité est élevée dans le quartier de la nouvelle gare des Bénédictins et, dès l’origine, est en grande partie habitée par des cheminots du Paris-Orléans, les autres étant souvent ouvriers de la porcelaine ou de la chaussure.
Le terrain étant moins étendu que celui de la cité-jardin de Beaublanc, l’architecte Roger Gonthier a privilégié une construction d’immeubles en briques, tous alignés en bordure de limite cadastrale sur la rue. A l’opposé, les trente-trois immeubles possèdent, sur cour, des décrochements pour éviter une trop grande monotonie architecturale.
Cet espace intercalaire est occupé par des jardins. L’emploi de la brique permet un jeu sur la polychromie (opposition entre une brique rouge pour le rez-de-chaussée et une brique plus jaune pour les étages), sur les formes (disposition des briques en denticules, en dents de scie, à plat ou en long ; frises très géométrisées au-dessus du rez-de-chaussée et au niveau du cinquième étage). Les portes d’accès aux immeubles, surmontées d’une importante imposte vitrée, sont surhaussées par un appui en béton dont les moulures sont à réglet. Les appuis et linteau des baies sont en béton.
Le rez-de-chaussée était destiné à abriter une vingtaine de boutiques. Les quelques portails d’accès à la cour intérieure sont délimités de chaque côté par un groupement de quatre colonnes en béton blanc à tailloir plat.
La cité fut édifiée à la demande de la municipalité (Léon Betoulle) par Roger Gonthier pour apporter un habitat décent à une époque où le taudis était légion. Elle fut conçue comme un quartier se suffisant à lui-même et agencée pour favoriser la vie en communauté, avec ses nombreuses courettes, ses communs communicants, son « jardin général, un lavoir et des bains-douches (sous la rampe de la gare) et des commerces en rez-de chaussée (une vingtaine prévue).
Ce premier ensemble collectif était pourvu d’éléments de confort qui s’apparentaient au luxe pour les gens modestes de cette époque : l’eau courante, le gaz, des poêles émaillés, des toilettes, la sonnette électrique (en option), un lavoir et des bains-douches, un foyer philanthropique, un équipement collectif achevé en 1931.
Des conditions d’existence qui confèrent aux « Couturiens » un certain prestige à l’époque par rapport aux Ponticauds, moins bien lotis et aux miséreux hébergés dans la caserne désaffectée des Bénédictins.
C’était aussi le terrain de toutes les solidarités, notamment au plus fort de la crise économique des années 1930 : l’Union (la Coop) distribuait des tickets de cinéma, la boucherie coopérative tuait le bœuf gras des chômeurs pour le carnaval… Tout le monde aux Coutures était coopérateur.
A deux pas du faubourg des Casseaux, le remblai servait de terrain de jeux aux enfants qui affrontaient ceux des « Ponts ».
La proximité de ce quartier ouvrier avec celui de la bonne société a valu de virulentes attaques à la municipalité socialiste des années 1920 de la part de la Haute-Société Limougeaude.
Les réalisations postérieures de cités populaires à partir de 1936 (année du Front populaire) : cités Casimir-Ranson, Léon-Bétoulle, Ernest Ruben, Victor Thuillat… s’inspirent des Coutures mais on abandonné la brique au profit du béton moins élégant.
L’avenue Locarno qui borde la Cité des Coutures a pris le nom de la ville Suisse des Accords de Locarno, pactes de non-agression signés en 1925 par la France, l’Allemagne, l’Italie, la Belgique, la Grande-Bretagne, la Pologne et la Tchécoslovaquie, en vue du maintien de la Paix, et qui furent violés par Hitler en 1936. (Source Histoire de Limoges)
► Il s'agit du plus grand groupement de logements réalisé par Roger Gonthier à Limoges. À l'époque, la Ville en pleine lutte contre la crise du logement et du bien-être ouvrier, édifie la cité des Coutures après Beaublanc. Pour mener à bien cette bataille, la cité a pour objectif d'accueillir un maximum d'ouvriers près de leur lieu de travail.
Pour la population ouvrière des ponts et des faubourgs, elle devient immédiatement un lieu de visite et de promenade dominicale.
Les Coutures deviennent cité
Autrefois délaissé, le quartier est réaménagé dès le 7 septembre 1925. L'accord est passé entre la Ville et l'OHBM, Gonthier établira les plans et devis. Ceux-ci s'élèvent à 13 millions d'euros d'aujourd'hui. Ce sera un ensemble de 33 immeubles comprenant en tout, 234 logements de 4 pièces, 100 logements de trois pièces, 51 logements de deux pièces et 22 boutiques. Logements très bien pensés avec vestibule, couloir et des WC dans chacun d'entre eux. Les Coutures se voient alors accueillir 1.655 personnes. Le confort y est optimal, les habitations comportent ce qui se fait de meilleur pour l'époque : eau courante, gaz et électricité.(source le Populaire 2017) Photothèque Pal Colmar.
Et plus récemment :
Un morceau d'immeuble de la cité des coutures (JLH novembre 2020)
►Derrière les murs de la cité des Coutures, morceau du patrimoine de la ville de Limoges, se dessinent parfois des vies entières comme celle de Fabienne Robin.
En ce mois d’août 1967, Fabienne Robin, âgée de 6 ans, franchit pour la première fois l’entrée de la cité des Coutures de Limoges. Entourée de ses parents et de ses trois frères, elle ne le sait pas encore, mais ce jour va bouleverser sa vie.
En cette fin des années 1960, le quartier est vivant. Les enfants jouent aux billes dans la cour et les bancs sont occupés par les mamans qui discutent pendant des heures. Les journées sont à la fois paisibles et animées, ponctuées de quelques coups de sifflet du gardien de la cité pour réprimander les personnes qui laissent sécher leur linge aux fenêtres.
« Les ascenseurs n’existaient pas, ni les salles de bain, mais nous étions heureux »
À l’intérieur, dans les étages, les résidents se croisent dans les escaliers et s’arrêtent souvent pour discuter et prendre les dernières nouvelles entre voisins. Quand, derrière les murs, les cheminées tournent à plein régime les jours d’hiver.
La cité populaire ne montre pas encore les premiers signes de modernité mais Fabienne y grandit heureuse. « Les ascenseurs n’existaient pas, ni les salles de bain dans la pièce d’à côté, mais nous étions heureux. Les bains-douches de la cité fonctionnaient toujours à cette époque et tous les gens du quartier s’y rendaient », se souvient Fabienne.
Avenue des Coutures, l’épouse du maire de Limoges, Louis Longequeue, tient la pharmacie (toujours en place aujourd’hui), entourée de nombreux commerces de bouche dont seule la boulangerie est restée. « Même si la cité a été préservée, le quartier a changé. Avant, les enfants jouaient ensemble, et moi, j’allais chaque année à la fête foraine des Coutures avec maman. Les animations s’installaient dans la cité au mois de juin. »
En remontant le fil de ses souvenirs, Fabienne Robin retrouve son âme d’enfant au pied des immeubles qu’elle connaît aujourd’hui depuis plus d’un demi-siècle. « Je n’ai jamais pensé partir des Coutures. Adulte, j’ai pris un appartement pour moi. Mes frères ont habité la cité toute leur vie et mes parents sont également restés aux Coutures jusqu’à leur décès en 2003 et 2005. »
En cette matinée de confidences, Fabienne Robin est plusieurs fois accostée par les habitants qui n’hésitent pas à la solliciter pour la vie quotidienne du quartier, ses joies, ses petits soucis. Devenue la mémoire des Coutures, Fabienne a vu toutes les transformations de la cité : l’arrivée du chauffage en 1979, les travaux réalisés au début des années 2000 pour la rénovation des immeubles avec l’installation des ascenseurs et salles de bain. « Après la démolition des bains-douches en 1972, les douches municipales installées avenue Locarno ont fonctionné très longtemps. Nous avons tourné une page quand les travaux ont commencé en 1999. Ils m’ont profondément marquée. Je me rappelle encore de la démolition des deux immeubles rue Adrien-Pressemane. C’était un morceau d’histoire qui s’en allait. J’ai eu de nouveau cette émotion quand les tours de La Bastide sont tombées. Je ne connais pas ce quartier mais j’ai eu une pensée émue pour les habitants. »
À la cité des Coutures, le temps continue de s’écouler entre les murs de briques conçus en 1929 par l’architecte Roger Gonthier. Les familles s’y installent toujours en 2020 mais elles se font plus discrètes. « La cité garde encore une mixité dans sa population avec, de nos jours, de plus en plus de familles monoparentales. Je regrette aujourd’hui que les nouveaux arrivants ne parlent pas ou si peu depuis que les ascenseurs sont là. C’est dommage. »
Alors, l’inauguration en 2016 du jardin Gonthier de la cité des Coutures, réalisé pour créer du lien, a beaucoup plu à notre quinquagénaire. « J’ai eu des petits problèmes de santé qui m’empêchaient de cultiver mon jardin mais j’espère bientôt avoir une parcelle individuelle ! »
Ce nouvel enthousiasme rend compte d’une certaine fierté d’habiter les Coutures depuis si longtemps. Au point d’avoir bataillé pour obtenir le nom Les Coutures à l’arrêt de bus de l’avenue principale du quartier. « Un autre nom, dont je ne me souviens pas, était prévu pour baptiser l’arrêt de bus. Cela n’avait pas de sens. Cet arrêt est celui du quartier, installé avenue des Coutures. C’était une évidence de l’appeler comme la cité. C’est le cas aujourd’hui. »
Une démarche qui montre l’attachement viscéral de Fabienne Robin aux Coutures, la cité qu’elle a rencontrée en 1967 et dont elle est restée amoureuse toute sa vie. Le Populaire du Centre Aline Combrouze.
►Notre Dame des coutures . Chapelle Notre-Dame-des-Coutures, Actuelle Aumonerie du collège Donzelot, ancienne usine de chaussures FAURE, photo JLH décembre 2020.
Photos JLH décembre 220
►A propos de cette Usine de Chaussures :
Dans un bâtiment construit en 1915, M. Faure implante une petite usine de chaussures vers 1925. Les raisons sociales se succèdent : Faure et Gardelle (1925), Faure et Debernard (1928), Faure et Masbatin puis Faure frères (1933). En 1943 l'usine Faure quitte ce site pour la rue François-Perrin. Les ateliers de l'impasse des Trois-Châtains sont alors repris par M. Debernard. Il fait appel à l'architecte Robert Mongnet pour l'extension des bâtiments en 1947. Les locaux sont repris par la société Perfecta vers 1950, qui exploite à cette période une usine de chaussures rue Gouffier-de-Lastours.
En 1955 les bâtiments sont acquis par l'association diocésaine de Limoges, et reconvertis en chapelle, sous le vocable Notre-Dame des Coutures. Une partie des ateliers a été plus récemment transformée en salle de sport.L'usine est dotée de 6 machines en 1925, 24 en 1935 et 1950.Entre 15 et 25 ouvriers travaillent dans ces ateliers en 1925, 55 en 1926, 75 en 1935, 50 en 1950. (source Actuacity Haute-Vienne)
►Raymond Dardillac
Un article de presse sur Aldo le Magicien. Cet article aurait aussi bien trouvé sa place à la page du Masgoulet.